Arménie/Azerbaïdjan : pourquoi un tel regain de tensions ?

Les tensions le long de la frontière et de la ligne de démarcation internationalement reconnue entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan étaient croissantes depuis quelques semaines déjà. Mais, le 12 juillet, elles ont donné lieu à de violents combats dans la région du Tavouch (Arménie)/Tovuz (Azerbaïdjan). En quelques jours, les parties ont déploré 12 tués (dont un civil) côté azerbaïdjanais et 4 côté arménien.

Sans que la cause soit clairement établie, les événements ont débuté avec la destruction par les forces arméniennes d’un véhicule des garde-frontières azerbaïdjanais. Cet événement a entraîné une flambée de violence, avant qu’un cessez-le-feu soit déclaré le 15 juillet. Les escarmouches sont nombreuses le long de la ligne de contact qui sert de frontière mais un tel accès de violences n’avait pas été constaté depuis 2016.

Erevan et Bakou s’accusent mutuellement de provocations, comme à l’accoutumée. Mais, cette fois, le porte-parole du ministère azerbaïdjanais de la Défense Vagif Dargahli a passé une étape en soulignant, le 16 juillet, que la centrale nucléaire arménienne de Mestamor était à portée de missile azerbaïdjanais, ce qui pourrait « conduire à une vaste catastrophe pour l’Arménie ». Cette saillie lui a valu une réponse cinglante du ministère arménien des Affaires étrangères, identifiant dans ces propos une « manifestation de terrorisme d’État » et le reflet des « intentions génocidaires de l’Azerbaïdjan ».

La centrale nucléaire de Metsamor n’est située qu’à 35 km de la capitale arménienne et de son million d’habitants.

Les États-Unis, l’Union européenne et la Russie ont lancé des appels aux parties en vue de l’adoption de mesures désescalatoires. Le ministre turc de la Défense Julusi Akar, lui, a déclaré que l’Arménie paierait pour ce qu’il a qualifié d’attaque de l’Arménie contre l’Azerbaïdjan.

Les spéculations vont bon train, pour tenter de comprendre les raisons de cette dégradation subite. Pour Emil Sanamyan, de l’université de Californie du Sud, la déclaration de Bakou revient à attirer l’attention de la communauté internationale sur l’achat par l’Azerbaïdjan d’un système de missiles sol-sol LORA auprès d’Israël. La focalisation sur la centrale nucléaire arménienne peut aussi être vue, selon le directeur du programme Caucase de Chatham House Laurence Broers, comme une façon de rappeler que cet équipement, qui fournit à l’Arménie un tiers de l’énergie qu’elle consomme, est trop âgé et devrait être démantelé. L. Broers y voit un possible moyen pour Bakou de mettre l’accent sur le fait que l’Azerbaïdjan vit sous la menace nucléaire civile arménienne. Il s’agit évidemment aussi de rappeler au monde la permanence de ce conflit gelé au cœur du Caucase.

Sources : Radio Free Europe/Radio Liberty, Ministère arménien des Affaires étangères, AzerNews.az, Armenpress.am.