Estonie : tensions politiques autour de la question des relations avec la Finlande

L’ambassadeur d’Estonie à Helsinki a été rappelé en juin par la Présidente Kersti Kaljulaid, à la demande de l’intéressé qui explique sa requête par deux éléments : son âge (66 ans et près de trois ans de service en Finlande) et ses différends avec le gouvernement estonien. Dans une interview accordée au journal finlandais YLE, Harri Tiido explique que sa vision du monde diffère par trop d’aspects de celle du gouvernement installé à Tallinn depuis le printemps 2019 et que, puisque celui-ci ne se retire pas, alors sans doute est-ce à lui de prendre sa retraite (selon YLE, la candidature de Sven Sakkov, directeur du think-tank estonien ICDS pourrait être envisagée pour lui succéder).

C’est la composante d’extrême droite de ce gouvernement, incarnée par le parti EKRE, qui pose problème à l’ambassadeur : il y voit une nuisance pour la posture internationale de l’Estonie et, tout particulièrement, pour ses relations avec la Finlande. Et de rappeler les critiques adressées il y a environ un an par le ministre estonien de l’Intérieur, Mart Helme, notamment sa sortie au sujet de la chef du gouvernement, élégamment qualifiée de « caissière devenue Première ministre ».

Pour H. Tiido, les représentants d’EKRE s’imaginent peut-être, avec de telles saillies, s’adresser à leur électorat estonien, en estonien et dans les frontières de l’Estonie, mais tout se sait et lorsque les diplomates doivent se tourner vers la Finlande, par exemple pour lui demander de l’aide, la démarche peut s’avérer particulièrement complexe.

Ainsi, l’ambassadeur juge que les relations entre les chefs de gouvernement estonien et finlandais sont moins intenses que par le passé, ce qui s’expliquerait aussi par les résultats des dernières élections dans chaque pays, faisant pencher l’un plus à droite et l’autre plus à gauche.

La pique a fait réagir le Premier ministre estonien Jüri Ratas (Parti du centre) qui, sur sa page Facebook, a expliqué que ses relations avec son homologue finlandaise Sanna Marin étaient intenses, ce qu’avait prouvé notamment la coordination interministérielle mise en œuvre dès mars 2020 dans le cadre de la pandémie de Covid-19 (il s’agissait essentiellement de régler les questions de déplacements de population, sachant que la main-d’œuvre estonienne œuvrant en Finlande est importante). On se souvient pourtant que des voix s’étaient élevées côté estonien contre la fermeture des frontières.

On constate par ailleurs que le taux de popularité du parti EKRE est en voie d’érosion selon les derniers sondages (juilllet 2020) : le taux de soutien au Parti de la réforme serait de 31,6 %, celui au Parti du centre de 24,7 %, tandis que celui accordé à EKRE n’atteindrait désormais que 15,6 %.

Sources : ERR.ee, Postimees.ee, The Baltic Times, Page Facebook du Premier ministre estonien.