Fêtes givrées en Russie

Ce n’est pas par hasard qu’en russe, le Père Noël s’appelle le “Père de la glace”. L’hiver est, partout à l’Est, la saison des fêtes. Petit tour d’horizon de ces réjouissances.


Pas une région sans sa légende ou sa fête qui remonte à la nuit des temps. Des documents racontent que le 24 décembre 1510 à Riga (Lettonie), des marchands dansaient autour d’un arbre décoré de roses artificielles avant de le brûler. On pense, bien sûr, au sapin devenu symbole presque universel de Noël. Dans la vieille Russie, pendant les douze jours des sviatki (début janvier), les villageois chantaient, dansaient et se déguisaient en monstres, comme lors des carnavals qui ont encore lieu dans certains villages.

Ces célébrations ancestrales ont souvent laissé des traces, se confondant progressivement avec les cérémonies religieuses, et principalement Noël. En Lituanie, les jours gras, période précédant le Carême, se sont confondus avec une célébration traditionnelle de la fin de l’hiver. La coutume esto-nienne de prédire l’avenir en jetant du plomb fondu dans l’eau a survécu au réveillon chrétien.

Selon les régions, les mêmes traditions ont une résonance chré-tienne ou folklorique. Ainsi, en Hongrie, des chanteurs de Bethléem passent de maison en maison, crèche sous le bras et racontent l’histoire de la naissance de Jésus-Christ. En Pologne, c’est Gwiazdor qui fait ses visites. Habillé d’un manteau de fourrure à l’envers, coiffé d’un chapeau en cuir, il annonce avec une cloche sa visite aux familles. Accompagné par d’autres personnages (la Mort, le Diable, le Policier, le Tzigane…), Gwiazdor offre des bonbons aux enfants, et souhaite une bonne année aux parents.

La parenthèse communiste

Les fêtes, n’ont pas échappé à la censure du régime communiste. Partout, Noël, fête bourgeoise, reposant sur les croyances et les superstitions, a été supprimé du calendrier. L’étoile au sommet du sapin soviétique, qui symbolisait jadis l’astre guidant les mages à Bethléem, s’est transformée en étoile rouge du Kremlin, symbole du pouvoir communiste. L’arbre de Noël était devenu “l’arbre du Nouvel An”.

Par ricochet, toutes les célébrations se sont reportées sur le Nouvel An, qui est devenu un peu partout à l’Est la première des fêtes, la seule de l’année à ne pas avoir de connotation politique. Des mesures étaient prises pour que Noël ne soit pas célébré clandestinement. En Estonie par exemple, le boudin cuit au four (plat traditionnel de Noël) était introuvable au mois de décembre. Cela n’a pas empêché Noël de continuer à être discrètement célébré. Avant de redevenir une fête officielle – et prépondérante après la chute du communisme.

Père Noël ou Saint-Nicolas?

Le Père Noël russe, Died Moroz, est souvent représenté avec sa petite fille, Sniegourotshka (dont le nom vient de snieg, qui signifie neige). D’après un ancien conte russe, Sniegourotshka est une ravissante petite fille faite de neige et pourtant bien vivante. Tentée de participer aux jeux des autres adolescentes qui s’amusent à sauter au-dessus d’un feu, vieille tradition païenne, elle finit par fondre au contact de la chaleur des flammes. C’est l’un des principaux personnages de l’imagerie du Nouvel An russe.

Mais dans plusieurs pays, c’est Saint-Nicolas qui est le plus populaire, car c’est lui qui offre les cadeaux aux enfants. Plus de cent églises lui sont dédiées en République tchèque, où il distribue les cadeaux la nuit du 6 décembre. En Hongrie, Saint Nicolas rend visite à chaque famille la veille de Noël. Les enfants placent leurs souliers ou leurs bottes bien en vue car s’ils ont été obéissants, il y dépose des friandises. Sinon, ils ne reçoivent qu’un virgács, petite touffe de brindilles dorées et liées par un ruban rouge.

A manger…

La religion joue un grand rôle dans la gastronomie festive. Le repas du réveillon, avant la messe de minuit, est le plus souvent maigre. En Pologne par exemple, la carpe au four (achetée vivante sur les marchés) est le plat national du réveillon. On mange aussi dans les églises le pain azyme (farine, froment et eau). Il est décoré de motifs religieux tels que la représentation de Jésus ou de la Vierge Marie.

En Lituanie, le repas traditionnel se compose de douze plats (symbole autrefois des douze mois de l’année, aujourd’hui des douze apôtres de Jésus-Christ).

Le jour de Noël ou du Nouvel An, la viande et l’alcool sont autorisés. Toutes les fantaisies ou les traditions culinaires sont possibles. Petit échantillon: Sarma yougoslave (feuilles de chou farcies de chair à saucisse), Cozonac (brioche de Noël), salade russe, porc rôti, koutia…. De quoi lutter efficacement contre le froid.

Par Clémentine BLONDET