Pologne : se libérer du gaz russe à partir de 2022

Par Marta Bogiel (sources : BiznesAlert.pl, Rzeczpospolita)

La Pologne dépend aujourd’hui à plus de 80% de la Russie pour ses approvisionnements, assurés par la compagnie Gazprom via un gazoduc de 4.000 kilomètres: Yamal part du nord-ouest de la Russie, traverse la Biélorussie et la Pologne et termine sa course en Allemagne. Aux termes d’un contrat signé en décembre 2010 par le vice-Premier ministre polonais de l’époque, Waldemar Pawlak, Gazprom vend chaque année 10 mds de m3 de gaz à la Pologne (qui en consomme 16 mds par an).

L’objectif affiché aujourd’hui par le gouvernement conservateur Droit et Justice (PiS, au pouvoir depuis l’automne 2015), est de s’affranchir totalement des importations de gaz russe dans un délai de cinq ans. Récemment, le vice-ministre polonais de l’Énergie Michał Kurtyka a déclaré que le pays n’avait pas l’intention de renouveler le contrat de 2010, et le président du groupe public gazier PGNiG Piotr Woźniak a affirmé qu’après 2022, la Pologne serait en mesure d’abandonner complètement l’approvisionnement en gaz russe.

Pour atteindre ces objectifs, la Pologne se tourne vers le gaz norvégien et des approvisionnements en gaz naturel liquéfié (GNL).

La mise en opération du gazoduc Baltic Pipe, qui permettra d’acheminer 10 mds de m3 par an de gaz norvégien via le Danemark et la mer Baltique, est prévue pour 2022. PGNiG souhaite exploiter lui-même en Norvège jusqu’à 2,5 mds de m3 par an (le reste étant acheté auprès de fournisseurs norvégiens). «L’idée est d’acheter le moins possible et de vendre autant de gaz que possible. En dehors des frais de transport, nous n’aurons pas de coûts supplémentaires», explique Piotr Woźniak. «Tout d’abord, nous voulons utiliser ce gaz en Pologne. Nous avons une mauvaise expérience avec Gazprom et nous payons beaucoup pour le gaz parce que nous n’avons pas le choix. […] Le prix du gaz dans le contrat Yamal est élevé. Nous voulons que l’offre de la Norvège soit légèrement inférieure au prix européen moyen afin que nous puissions être compétitifs sur le marché».

L’autre pilier de la stratégie énergétique de Varsovie repose sur l’exploitation du terminal méthanier de Świnoujście, en Poméranie polonaise. Les contrats signés avec le Qatar doivent assurer l’approvisionnement en GNL à hauteur de 2,7 mds de m3 par an jusqu’en 2034. Depuis que le terminal a commencé à fonctionner, en juin 2016, 21 méthaniers ont déchargé leur cargaison sur le site, en provenance du Qatar mais également de Norvège et des États-Unis.

Pour Varsovie, la diversification des fournisseurs et le développement des infrastructures est une priorité absolue. Selon M.Kurtyka, la Russie utilise le gaz «comme une arme»; et de rappeler que Moscou a «fermé le robinet» à plusieurs reprises au cours des dernières années, affectant l’Ukraine mais aussi, à un degré moindre, la Pologne. Le gouvernement polonais s’oppose par ailleurs au projet de gazoduc Nord Stream 2, qui doit doubler les livraisons de gaz russe vers l’Allemagne via la Baltique, sans passer par la Pologne.