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Le mois d’octobre sera pour la Roumanie un moment historique. C’est à cette date qu’elle saura si elle peut intégrer les structures de l’Union européenne à partir du 1er janvier 2007. Même si le tourisme n’est pas encore considéré comme une priorité par le gouvernement roumain, il importe de savoir si elle est capable de devenir compétitive sur un marché européen déjà structuré.


Calimanesti CaciulataCe pays dont le tourisme intérieur était extrêmement développé pendant la période communiste, redécouvre l’existence de destinations touristiques à l’étranger mais encore inaccessibles car trop chères. Les Roumains cherchent à s’évader le plus loin possible car leur propre pays les déçoit. Alors que faire pour que la Roumanie redevienne attirante pour nos propres citoyens, tout en proposant aussi à l’Europe une nouvelle destination touristique qui a, au moins, un atout : la fraîcheur ?

La station de Calimanesti Caciulata, une destination pour le troisième âge De nombreux sites touristiques roumains ne s’adressent qu’à une clientèle nationale : peu d’hôtels peuvent proposer des services de haut niveau, capables de satisfaire un public étranger. De plus, ils sont concentrés pour la plupart dans quelques endroits et surtout dans la capitale.

La plus fréquentée destination montagnarde reste la vallée de Prahova, proche de la capitale et de quelques villes plus importantes, relativement facile d’accès, avec une longue tradition de tourisme haut de gamme. Un peu plus à l’ouest, juste au centre du pays, la vallée d’Olt ne réussit pas à s’imposer avec autant de succès. Pourtant, l’accès en est encore plus facile grâce à l’ancienne route romaine, dans la vallée parsemée d’églises et de monastères médiévaux qui traverse cette chaîne cristalline massive.

Bien que située au centre du pays, à deux heures et demie de Bucarest et à une heure de quelques villes importantes de la Roumanie (Craiova, Pite?ti, Sibiu), la station Calimanesti Caciulata est une station balnéaire dont les sources thermales sont captées à 1200 m de profondeur, extrêmement riches en soufre et utilisées depuis l’époque romaine. Agréée pour des cures et des soins, elle essentiellement fréquentée par le troisième âge, d’où un manque de dynamisme qui lui est souvent reproché. Les habitants s’en plaignent car cette catégorie de personnes, retraitées, ne sont pas suffisamment riches, pour alimenter les circuits économiques de la station. Ces touristes se disent trop âgés et trop fatigués pour d’autres activités qu’une courte promenade, le soir, sur la falaise de la rivière Olt. Les restaurants restent vides la plupart du temps, il n’existe qu’une seule boîte de nuit, les terrains sportifs manquent et les initiatives locales sont inexistantes. Les habitants, y compris les autorités, ne savent pas comment retenir pour un séjour complet le nombre impressionnant de voyageurs qui ne font que traverser chaque jour cette station.

Pourquoi une telle fréquentation dans une station démodée ? 

Pourtant, des pensions privées ont commencé à apparaître et à se moderniser. Une nouvelle piscine a été construite, un grand restaurant avec piscine vient d’ouvrir ses portes, le commerce local se développe, autant de marques d’un certain dynamisme, qui relève de l’initiative privée et vise la nouvelle classe moyenne, sous représentée encore en Roumanie, mais qui s’accroît.

La station comprend un complexe hôtelier autrefois détenu par l’Etat, aujourd’hui à capital mixte. Cinq grands hôtels, trois villas, quelques restaurants cafés et campings accueillent au moins 2/3 des touristes venus dans la station. Il existe aussi un hôtel appartenant au Service roumain d’information (il s’agit des services de sécurité du pays). Du reste, quelques villas privées commencent à faire vigoureusement concurrence aux anciennes structures.

Les responsables du complexe hôtelier de la station affichent complet pendant toute l’année. Les programmes médicaux et sociaux financés par le gouvernement leur assurent une clientèle fidèle, à quoi s’ajoutent les différents événements comme la conférence nationale des médecins au mois d’avril 2006, le tourisme d’affaire, l’organisation de cérémonies et des événements locaux.

Très peu d’endroits dans le monde offrent des traitements de prévention et d’amélioration de la vieillesse ainsi que différents traitements cosmétiques comme ceux mis au point par la chercheuse roumaine Ana Aslan. Ces services être proposés bientôt à Calimanesti Caciulata, surtout dans la perspective d’une éventuelle intégration européenne. Cela représente, pour la plupart des touristes, l’atout incontestable de la région qui pourrait, sans doute, constituer un point de départ pour un éventuel développement touristique surtout dans le contexte de la tradition gériatrique de la Roumanie.

Tout comme les structures hôtelières, les comportements et les mentalités héritées de l’époque communiste ; c’est à ce niveau que le changement va être le plus difficile dans un délai de temps acceptable pour une reconversion efficace. Le niveau des services offerts par cette station reste dans des limites considérées normales en Roumanie, mais est-ce suffisant pour la rendre compétitive ? Les clients ne sont pas satisfaits des chambres anciennes, du mobilier dégradé et de la nourriture. Le personnel doit apprendre à communiquer mieux avec les touristes. Il est tout à fait vrai que ce groupe d’opinion ne représente que 1/5 du total car, objectivement, les services offerts ne sont pas différents de ceux d’autres stations, autrefois appartenant à l’Etat, aujourd’hui en voie de transformation capitaliste.

Le sport est devenu, dans l’esprit de cette époque, une nouvelle préoccupation pour les Roumains. Il faut donc être ouvert à cette tendance et commencer à investir dans des équipements comme une base aquatique, des terrains de sport, organisation d’excursions, de promenades en bateau sur la rivière Olt…. Bien que les touristes soient également demandeurs d’activités culturelles et de spectacles (théâtre, cinéma, excursions, spectacles folkloriques), les autorités locales interdisent à l’ensemble folklorique local d’organiser des spectacles, même gratuits ; le cinéma est fermé depuis des années, les troupes de théâtres de la capitale départementale située à 20 km ne sont jamais invitées. Les habitants et les autorités ne semblent pas avoir encore saisi tout l’intérêt économique qu’ils pourraient tirer de leur cadre et infrastructures. C’est probablement pourquoi ces dernières disent de ne pas avoir de demande pour organiser toutes ces activités et initier tous ces projets.

Calimanesti Caciulata, une station européenne ? 

Certes, cette station restera toujours dans le circuit national, car sa clientèle composée de personnes âgées y trouvera encore longtemps une bon rapport qualité–prix grâce aux subventions de l’Etat qui assure ainsi des revenus constants et satisfaisants à la station. Est-ce pourtant suffisant dans le contexte futur de l’intégration européenne et de l’ouverture extérieure ? Les atouts réels de la station (accessibilité, potentiel naturel, tradition et savoir-faire balnéaire) peuvent évoluer ou se diversifier afin d’attirer au moins une partie des touristes qui visiteront la Roumanie.

Les acteurs locaux (initiative privée et projets officiels initiés par la mairie) ainsi que le gouvernement roumain doivent rechercher des financements européens dont l’accès reste encore lourd et piégé par la bureaucratie et la corruption.

Une génération de spécialistes en tourisme, capables à mettre au point une offre diversifiée va bientôt apparaître pour promouvoir cette station et la rendre compétitive sur le marché national et la faire connaître sur le marché international. Cette année, pour la première fois, la station Calimanesti Caciulata a été présente à une foire internationale de tourisme sous l’emblème : « A spa for four seasons » ce qui marque un point essentiel de départ pour un nouveau tourisme local.

Pour découvrir la station :
www.thermal-hotel.ro
www.calimanesti-caciulata.ro

* Ana Petcu est responsable des TD de géographie économique, Faculté de Géographie, Université de Bucarest, Roumanie.