Bosnie-Herzégovine : révélations sur les dernières tractations entre dirigeants serbes et croates

Au cours des deux derniers mois, deux des plus importants dirigeants bosniens se sont déplacés l’un en Croatie, puis les deux en Serbie, suscitant l’inquiétude de leurs homologues bosniaques, mis à l’écart de ces rencontres : en effet, à l’invitation du président Zoran Milanovic, le membre serbe de la présidence fédérale de Bosnie-Herzégovine (BiH) Milorad Dodik, connu pour ses positions populistes en faveur de l’autodétermination des bosno-serbes, s’est rendu à Zagreb, où il a fait des déclarations critiquant le fonctionnement de son pays, le 16 septembre. Puis, le 12 octobre, le président de Serbie, Aleksandar Vučić, a accueilli à Belgrade M. Dodik ainsi que le vice-président de l’Assemblée nationale de Bosnie-Herzégovine Dragan Čović pour un « dîner spécial », afin de discuter de la situation dans la région. Le chef du Parti de l’action démocratique (SDA), Bakir Izetbegović, a vivement critiqué cette invitation qui concernait vraisemblablement la Bosnie-Herzégovine, mais où aucun représentant bosniaque n’était invité.

Le 25 octobre, la radio Free Europe, sentant que des tractations internationales étaient en cours sans que les personnes impliquées ne souhaitent encore en révéler la finalité, a organisé un débat sur cette situation inhabituelle, où les dirigeant croates et serbes ont invité de hauts responsables bosniaques, « en contournant les organes légitimes de l’État de Bosnie-Herzégovine ».

Les débatteurs, des universitaires, ont bien souligné une pratique nouvelle. L’un d’entre eux, Miloš Šolaja, professeur à la faculté des sciences politiques de Banja Luka, a également fait observer qu’en Bosnie-Herzégovine « les véritables détenteurs du pouvoir politique sont les dirigeants des trois peuples constituants [et non la « nation bosnienne »], de sorte que les dirigeants de Zagreb et de Belgrade ont décidé de parler à ceux qui détiennent ce pouvoir ».

Les masques sont tombés le 26 octobre lorsque M. Dodik a dévoilé à la presse locale que « Serbes et Croates » rédigeront prochainement « une déclaration commune sur la façon dont la Bosnie-Herzégovine peut fonctionner », car ce pays « a été mal conçu ».

Le dirigeant bosno-serbe a poursuivi en précisant que, si cette déclaration n’était pas acceptée, « la seule solution serait la séparation » (i. e. la partition territoriale du pays en plusieurs entités distinctes). Il a ajouté de manière menaçante que « la séparation ne signifiait pas pour autant la guerre, mais que l’interventionnisme international produirait quelque chose comme ça ».

Sources : Slodna Bosna, Dnevni Avaz, Radio Free Europe.