Après s’être opposé à l’ouverture des négociations d’adhésion avec l’Albanie et la Macédoine du Nord, avoir fustigé certaines « filières bulgares ou ukrainiennes clandestines » de migration, suscitant de vives réactions de la part de Sofia et Kiev, le Président français est à l’origine de nouvelles tensions diplomatiques, cette fois avec la Bosnie-Herzégovine (BiH), un autre pays candidat à l’adhésion européenne. Dans un long entretien accordé à The Economist (7 novembre 2019), il a comparé la Bosnie-Herzégovine, « confrontée au retour des djihadistes », à une « bombe à retardement ».
Déjà, début novembre, les ministères bulgare et ukrainien des Affaires étrangères, avaient convoqué les ambassadeurs de France à Sofia et Kiev pour s’expliquer. La ministre bulgare des Affaires étrangères Ekaterina Zaharieva avait qualifié les propos du Président français d’« insultants pour la communauté bulgare » résidant en France et le vice-Premier ministre Krasimir Karakachanov y avait vu une manifestation d’« arrogance politique ». En Ukraine, l’ambassadeur de France avait dû justifier les propos d’E. Macron concernant la migration et l’emploi légal en précisant qu’ils avaient été sortis de leur contexte.
Quelques jours plus tard, l’ambassadeur de France à Sarajevo a dû, lui aussi, venir s’expliquer auprès des autorités locales. La présidence du SDA (Parti de l’Action démocratique) réunie pour évoquer la situation politique en BiH, a inclus à ses conclusions générale un paragraphe pointant « les messages décevants » du Président français sur l’OTAN qui « nuisent à la stabilité et à la perspective européenne des Balkans occidentaux » et favorisent un « blocus de l’intégration européenne des Balkans occidentaux ».
Le SDA a estimé que, si E. Macron souhaitait se concentrer sur les difficultés politiques auxquelles la BiH est réellement confrontée, il apporterait un « soutien constructif, utile à la fois à la Bosnie-Herzégovine et à l’Union européenne », à l’instar de ces prédécesseurs, qualifiés de « France amie » Cette position a été immédiatement soutenue par Bakir Izetbegović, membre de la présidence collégiale fédérale.
Le Président en exercice, Željko Komšić, a précisé que les déclarations du chef de l’État français étaient de nature à fournir des arguments aux eurosceptiques et aux opposants à l’intégration de la BiH à l’OTAN.
Largement relayés par les médias bosniens, macédoniens, albanais et bulgares, les propos tenus au cours de ces dernières semaines ont contribué à la dégradation de l’image d’E. Macron dans la région. Certains craignent qu’ils puissant favoriser le renforcement de l’influence de pays concurrents de l’UE dans la péninsule, tels que la Russie, les États-Unis, la Turquie, l’Arabie Saoudite ou l’Iran.
L’Allemagne, elle, conserve son influence : Ursula Von der Leyen, sur la même ligne officielle que la chancelière allemande Angela Merkel, a déclaré à Berlin le 7 novembre que l’UE avait beaucoup demandé à la Macédoine du Nord ainsi qu’à l’Albanie et que ces États avaient « satisfait aux exigences européennes » ; la promesse faite devait donc être tenue et les négociations d’adhésion entamées.
Sources : Slobodna Bosna, Oslobojdenie, The Bosnia Times, Reuters, The Economist, The Financial Times, Svobodna Evropa, FrogNews, Nova TV, Kanal 5.