Alors que, depuis le 24 février, les dirigeants de l’Union européenne font bloc pour dénoncer l’invasion de l’Ukraine, une partie de l’opinion publique bulgare soutien ouvertement Vladimir Poutine.
Le jour de la fête nationale, le 3 mars, alors qu’un cortège défilait en soutien à l’Ukraine et au peuple ukrainien dans les rues de Sofia, une seconde manifestation rassemblait des soutiens à l’invasion russe présentée comme une libération du territoire du Donbass. Le chef de l'Etat Roumen Radev a appelé ses concitoyens à ne pas céder à la haine, mais la société civile reste divisée sur le sujet.
Ces voix dissonantes sont en partie la conséquence d’actions de désinformation anti-occidentales et hostiles à l’OTAN sur les réseaux sociaux. Elles trouvent un écho favorable auprès des classes populaires et des milieux complotistes. Sur Facebook, de nombreux profils d’internautes relaient et commentent par exemple une déclaration attribuée sans preuve à V. Poutine : « La Russie rendra la Bulgarie forte et sûre si elle quitte l’OTAN ! » Comme d’autres fakes news, cette information s’est répandue sur la toile et agrémente les conversations familiales et entre amis. Les publications de ce type portant sur des pseudo déclarations du président russe (ainsi que sur le soutien de V. Poutine au populaire président R. Radev) se sont multipliées au cours des derniers mois (« L’OTAN veut utiliser la Bulgarie contre la Russie », « L'adoration de l'UE et des États-Unis effacera la Bulgarie »…).
Selon de nombreux observateurs, cette propagande pro-russe s’est diffusée d’autant plus facilement au sein de la population qu’elle prend appui sur la nostalgie d’un régime socialiste idéalisé, sur la mémoire populaire et les liens historiques entre la Bulgarie et la Russie : en effet, les petits Bulgares apprennent sur les bancs d’école que le Tsar de toutes les Russies, Alexandre II, a libéré la Bulgarie du « joug ottoman » en 1878. L’ancien « pays frère » possède toujours un fort capital de sympathie auprès d’une partie importante de l’opinion publique. De plus, l’une des principales formations politiques, le Parti socialiste bulgare (regroupant les anciens membres du parti communiste), est toujours « un fervent partisan des intérêts économiques et politiques de la Russie dans le pays », selon un rapport intitulé Les pages Facebook pro-Kremlin en Bulgarie et en Roumanie et leur impact sur les médias sociaux, publié par le Centre d'étude de la démocratie. Enfin, certains journalistes bulgares, comme le célèbre Valentin Gueorguiev (du journal Douma), ne cachent pas non plus leur russophilie et servent la propagande russe.
Sources : Svobodna Evropa, Debati, Factcheck, Centre d'étude de la démocratie, entretiens avec des ressortissants bulgares de Bulgarie et de l’étranger.