Roumanie : suites de la révocation de l’ancienne Procureure L. Kövesi

En 2006, la magistrate Laura Codruța Kövesi était nommée à la tête de la Direction nationale anti-corruption (DNA) du Parquet général à Bucarest. Il s'agit de la première femme ayant occupé le poste de Procureur général en Roumanie. Elle a progressivement acquis la réputation d'une magistrate à la fois discrète et investie dans ses missions de lutte contre la corruption.

En février 2018, le ministre de la justice Tudorel Toader avait cependant ouvert contre elle une procédure de révocation pour violation de la Constitution, sur fond de tensions entre le gouvernement et la présidence. Le Président Klaus Iohannis avait refusé cette révocation, considérant que les arguments du ministre étaient insuffisants, mais le Conseil constitutionnel l'a in fine contraint à la limoger, le 9 juillet 2018. À aucun moment de l'affaire, la magistrate révoquée n'avait été citée à comparaître. Elle n'avait donc pas eu la possibilité de se défendre. Dans ces conditions, elle a estimé que son droit à exercer un recours avait été violé.

Les 8 et 9 janvier 2019, L. C. Kövesi a déclaré à la presse nationale qu'elle avait déposé une plainte auprès de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH)en décembre 2018. Elle aurait effectué cette démarche non pour obtenir une compensation, mais pour protéger l'ensemble des procureurs accédant à des postes de responsabilité et afin d'éviter que ne se reproduise une telle révocation, qui « met à genou » les magistrats et la justice, et crée un précédent. Ayant été soumise à une procédure de révocation par le Conseil constitutionnel, elle fait notamment valoir que la loi de fonctionnement de la juridiction suprême n’accorde à cette dernière aucune compétence sur le renvoi ou la sanction des procureurs nommés à des postes de direction.

La procureure conserve le soutien d'une partie de l'opinion publique, notamment de ceux qui craignent le développement de la corruption en Roumanie. Pour rappel, fin mai 2018, une pétition demandant son maintien en fonction avait recueilli 110 000 signatures.

La CEDH est donc appelée à se positionner sur cet épineux dossier qui arrive sur son bureau alors que la Roumanie se trouve sous le feu des projecteurs, puisqu'elle vient d'hériter de la présidence du Conseil de l’Union européenne pour six mois (janvier-juin 2019).

Sources : Antena 3, Digi 24, StiriPROTV.

Stéphan ALTASSERRE