Russie : le Parquet se penche sur la légalité de la reconnaissance de l’indépendance des États baltes

Par Céline Bayou (sources : Gazeta.ru, Delfi.lt, Interfax, Newsru.com, Ukraine Today)

Le Parquet général de Russie s’est attelé à une tâche a priori inattendue, qui consiste à vérifier la légalité de la reconnaissance de l’indépendance de la Lituanie, de la Lettonie et de l’Estonie par le Soviet suprême soviétique en 1991.

Cette démarche a été entamée à la demande des députés russes Evguéni Fiodorov et Anton Romanov, tous deux affiliés au parti Russie unie et qui ont estimé en juin 2015 qu’il pourrait y avoir des similitudes avec le cas criméen. En effet, en 2014, le Procureur général de Russie a estimé que la Crimée avait été illégalement attribuée à l’Ukraine en 1954. La faille cette fois serait dans une reconnaissance accordée, selon ces députés, par une instance provisoire, créée le 5 septembre 1991 au lendemain du putsch, et qui n’avait pas autorité à prendre ce genre de décision.

Cette action ne va pas sans provoquer des remous dans les pays visés, même si ces derniers sont membres de l’Otan et se sentent dans une certaine mesure sécurisés par cette appartenance.

Toujours très ferme, la Présidente lituanienne, Dalia Grybauskaitė, a déclaré: «Nous avons acquis notre indépendance par le sang et le sacrifice des habitants de la Lituanie. Personne ne peut y attenter. Nous sommes les seuls à pouvoir décider de notre destin.» Le ministre lituanien des Affaires étrangères, Linas Linkevičius, a quant à lui estimé que cette action du Parquet russe est une provocation de plus, absurde tant juridiquement que moralement et politiquement. De son côté, Vytautas Landsbergis, connu pour sa faible empathie à l’égard du Kremlin, s’est dit douter de la légalité de cet État russe que quelques députés lituaniens pourraient, eux aussi, mettre en doute devant le Parquet de leur propre pays: «Qu’est-ce que c’est que cet État qui a détrôné son Tsar et l’a tué ainsi que ses enfants?», s’est interrogé le père de l’indépendance lituanienne.

À l’heure où les trois pays, inquiets des agissements de la Russie en Ukraine, demandent –et ont obtenu– des mesures de réassurance de la part de l’Otan et des États-Unis, cette initiative de la Russie contribue à augmenter les tensions et à les conforter dans leur méfiance.