Par Stéphan Altasserre (sources : Kapital, Sega, Mediapool)
Il y a plus d’un an, le 16 décembre 2015, la presse bulgare diffusait l’information selon laquelle le gouvernement envisageait la construction d’une autoroute, baptisée Hemus, destinée à relier Sofia à Varna. Pour mener à bien ce projet, il avait été prévu de faire appel au consortium PST Group, lié à l’oligarque Deljan Peevski, malgré un prix deux fois plus cher que les prévisions; le coût des travaux pour les derniers 60 km était estimé à un milliard de leva.
Titrer ainsi sur l’implication d’un cercle économique lié à D.Peevski, député du Mouvement pour les Droits et Libertés (MDL) qui avait brièvement été nommé à la tête de l’Agence d’État de la sécurité nationale (DANS), avait suffi alors à créer un scandale et à enflammer la presse bulgare.
Deux mois après le début de cette affaire médiatique, le 16 février 2016, le gouvernement avait semblé capituler en annonçant l’annulation de ce marché public. Selon le ministre des Finances Vladislav Goranov, des pressions européennes et la volonté de mettre l’ensemble des grands marchés en conformité avec la nouvelle loi chargée de les encadrer étaient la cause de ce renoncement. Le gouvernement avait toutefois réfuté l’hypothèse selon laquelle sa décision aurait été la conséquence du scandale Peevski. D’autres marchés publics semblent néanmoins avoir été mis en cause depuis, la plupart liés aux intérêts de cercles économiques en relation avec le MDL. Apparemment, le gouvernement souhaitait démontrer sa volonté de transparence sur leur attribution.
Pourtant, le 9 janvier 2017, c’est Păstroj Burgas, une des filiales d’Hidrostroj, qui a emporté le marché pour construire la section de 9,3 km d’Hemus, entre Yablanitsa et Boaza. Or, cette entreprise est détenue par la banque BKT Vodstroj 98. Le banquier Tsvetan Vasilev, son ancien actionnaire majoritaire, avait déclaré le 19 juin 2016 sur la chaine BTV que sa banque était contrôlée par l’entrepreneur Ivan Mirinski, lui-même «marionnette de Peevski».
S’il est à noter qu’aucun lien juridique n’apparaît entre le sulfureux oligarque bulgare et la société Vodstroj 98 au niveau de son enregistrement public, contrôler des actifs à l’aide de prête-noms est en Bulgarie une vielle habitude datant du début de la transition postsocialiste. Cette manière de procéder a permis à de nombreux nouveaux riches de mener leurs affaires dans ce pays. De plus, PM Kontrol a effectivement détenu jusqu’à 99,98 % des actions de Vodstroj 98.
Habitués à ce retournement de situation dans le domaine des marchés publics, certains médias bulgares réitèrent leur méfiance quant aux procédures d’attribution de ces marchés et quant aux stratégies employées par les affairistes pour les obtenir.