Chisinau, capitale de la Moldavie, capitale des contrastes


Maison traditionnelle de Chisinau.Reportage photo réalisé en décembre 2008 


Entre tradition et modernité © C.Bayou
Chisinau, capitale d’une Moldavie en mal d’affirmation, semble concentrer pas mal des contradictions de ce petit pays (4,3 millions d’habitants, dont 1 million partis pour l’étranger) coincé entre Roumanie et Ukraine, entre Union européenne et grand frère russe. Mélange étonnant d’identités, elle est capitale d’Etat aux allures de petite ville verte, produit de l’architecture soviétique dotée de vestiges en plus ou moins bon état de l’architecture traditionnelle roumaine, combinant avenues austères et débordement de couleurs à la prochaine rue…


L’identité originelle © C.Bayou
Devant le musée national d’Archéologie et d’histoire se dressait jusque récemment une statue de Lupoaica Romei (la louve de Rome), nourrissant Romulus et Remus. Façon de rappeler l’origine latine des Moldaves. La statue est en cours de restauration et certains, à Chisinau, laissent entendre que cette opération pourrait bien se prolonger…


«La Bessarabie, terre roumaine» © C.Bayou
En 1812, le territoire situé entre le Prout (frontière entre la Roumanie et la Moldavie, à l’Ouest) et le Dniestr (frontière avec la république autoproclamée de Transnistrie, à l’Est), est passé sous contrôle de la Russie, sous le nom de Bessarabie. Depuis la chute du Mur, certains ont eu -ou ont encore- l’espoir de voir la Moldavie et la Roumanie se réunir. A l’inverse, après leur retour au pouvoir en 2001, les communistes, derrière le Président Vladimir Voronine, ont accusé Bucarest de soutenir un mouvement unioniste en Bessarabie.


Le cimetière juif de Chisinau © C.Bayou
Au nord-ouest de la ville s’étend l’immense cimetière juif, forêt envahie de tombes pour beaucoup à l’abandon, portant des inscriptions en hébreu, roumain cyrillisé, roumain latinisé ou russe. Plus au sud, dans le centre, les vestiges du quartier juif révèlent une histoire achevée: il ne reste qu’une synagogue en activité à Chisinau, contre 70 avant la Guerre.


Rue du 31 août 1989 © C.Bayou
Dès 1988, les intellectuels moldaves (certains se réuniront à partir de 1989 autour du Front populaire) ont demandé le rejet de l’alphabet cyrillique, introduit en Bessarabie en 1941, et le rétablissement de l’alphabet latin, ainsi que la proclamation du roumain comme langue d’Etat. Le 31 août 1989, le Soviet suprême de la république socialiste soviétique de Moldavie a déclaré le «moldave» langue d’Etat et réintroduit l’alphabet latin; le contexte était alors celui d’un cheminement vers l’affirmation de l’indépendance du pays.
Depuis 1994, la Constitution adoptée par le gouvernement nouvellement élu a fait du «moldave» la langue d’Etat, contre l’avis unanime des linguistes qui ont démontré l’unicité de cette prétendue langue avec le roumain. Le 31 août est désormais «Jour de la langue».


L’intégration obsessionnelle © C.Bayou
Sis dans un bâtiment flambant neuf, le MAE moldave est en fait un ministère des Affaires étrangères et de l’Intégration européenne. A ne pas confondre avec le ministère de la Réintégration, qui fait référence à la réintégration de la Transnistrie, république sécessionniste autoproclamée, l’un des obstacles majeurs sans doute à l’intégration de la Moldavie dans l’Union européenne.


Manifestation de retraités © C.Bayou
Des retraités protestent contre l’abandon dans lequel ils sont laissés. Les banderoles, en roumain et en russe, évoquent la défense de leurs droits et demandent à ce que cesse le «génocide» dont ils sont victimes.


Une allégresse dans l’adversité © C.Bayou
Mais Chisinau, c’est également une ville réputée pour ses nuits festives, sa joie de vivre et son allégresse. Une sorte de dynamisme anime les rues de la ville et la jeunesse. Celle qui dispose d’un certain pouvoir d’achat (et peut, par exemple, se payer les restaurants qui pratiquent des prix parisiens) mais celle aussi qui voudrait, malgré la grande difficulté, ne pas se dire que son seul avenir est à Bucarest ou au-delà.
Cette jeunesse écoute, notamment, le groupe moldave qui a émergé ces dernières années, Zdob si Zdub. Le succès de cette formation d’ethno-rock décalé purement moldave a désormais traversé les frontières: il est plus facile, dit-on, de les écouter à Kiev ou Bucarest qu’à Chisinau, question de taille sans doute!
Pour les découvrir:
http://fr.youtube.com/watch?v=6IFrakGsdvs
http://fr.youtube.com/watch?v=ylL-Askiai8