Macédoine : l’Union européenne appelée à s’engager différemment

Par Edouard Tallet (sources : Meta.mk, IBNA, Balkan Insight)

Une conférence consacrée à l’instabilité interne de la République de Macédoine s’est tenue le 28 octobre 2015 à Belgrade. À cette occasion, Aleksandra Joksimovic, présidente du Centre de politique étrangère, a déclaré que l’Union européenne devrait s’engager plus directement dans la résolution de la crise interne qui déchire ce pays depuis des mois, partie de soupçons d’écoutes pratiquées de manière massive par le gouvernement. Pour cela, l’Union doit changer d’attitude: «L’UE en tant que facteur de stabilité est juste un mot pour les Macédoniens. La communauté internationale laisse le problème se résoudre de lui-même mais cela ne se fera pas… L’approche technocratique de l’UE est l’un des problèmes», a-t-elle estimé.

Le 21 octobre, le médiateur pour l’UE, Peter van Houtte, avait déclaré que le gouvernement et l’opposition devaient s’accorder urgemment quant aux réformes les plus importantes si les acteurs ne voulaient pas voir réduit à néant l’accord de crise négocié en juillet avec Bruxelles. «La Macédoine pourrait se retrouver aussi isolée que le Bélarus», avait-il mis en garde, précisant qu’il s’agissait désormais de choisir entre isolement et cours euro-atlantique. Cette prise de position en a étonné plus d’un, première intervention si ouverte du médiateur. Deux jours après, l’ambassadeur italien à Skopje, Massimo Bellelli, avait déclaré que l’UE ne relâcherait pas la pression qu’elle exerce sur la Macédoine afin d’accélérer un accord entre partis et une sortie de crise: «Nous sommes inquiets de la situation et espérons qu’un accord sera trouvé. Nos experts européens sont prêts à apporter leur aide au gouvernement et aux partis politiques. Nous voyons la Macédoine comme un morceau de l’Europe et nous voulons qu’elle entre dans notre famille. Nous sommes déterminés à exercer une pression jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé

Depuis l’été 2015, la scène politique macédonienne se déchire, après les forts soupçons d’implication du Premier ministre Nikola Gruevski dans une affaire de surveillance illégale d’environ 20.000 personnes, dont certains ministres. Le chef du gouvernement n’a depuis pas changé de ligne et affirme que les enregistrements produits sont des faux réalisées par les services secrets d’un État étranger, dans le but de déstabiliser le pays.

Sonja Biserko, directrice du Comité Helsinki pour les droits de l’homme en Serbie, a estimé que l’instabilité macédonienne doit être replacée dans le contexte de crise régionale et globale qui prévaut aujourd’hui. Elle a argué d’une instabilité régionale selon elle bien plus notable aujourd’hui qu’il y a dix ans et des croisements d’intérêts américains et russes dans les Balkans. D’autres participants à la conférence sont revenus sur les questions de relations ethniques dans la région et sur celle de la dispute gréco-macédonienne concernant notamment le nom du pays et qui entrave son rapprochement de l’UE.