Monténégro : victime de la ’diplomatie de la dette chinoise’

Le Monténégro, un territoire montagneux d’à peine 13 800 km² où vivent 610 000 habitants, est le seul pays des Balkans à ne posséder encore aucune autoroute. Pour remédier à cette situation, le gouvernement a lancé le projet de construction d’une autostrade reliant le port monténégrin de Bar, sur la côte adriatique, à la Serbie voisine. Cependant, le coût estimé de ce chantier pharaonique dépasse les 2,85 Mds €, soit près du tiers du PIB du pays. Malgré les réticences exprimées par le FMI au vu de la capacité de remboursement du Montenégro, Podgorica a passé contrat avec la China Road and Bridge Corporation (CRBC) en 2014, s’endettant auprès de la Bank of China à laquelle il va devoir s’acquitter du versement d’1 Md € d’ici juillet 2021, une somme dont le Monténégro ne dispose pas.

La capacité de remboursement du pays a en effet été fortement affectée par la crise consécutive à la pandémie de covid, alors que le Monténégro est fortement dépendant du tourisme : 2020 a bien été une année noire pour ce secteur d’activité. Pour le Frankfurter Allgemeine Zeitung, le Monténégro devient ainsi actuellement la première victime européenne de la « diplomatie de la dette chinoise ».

Très confiant, Podgorica vient de se tourner vers l’Union européenne pour solliciter son aide. La porte-parole de la Commission européenne, Anna Pisonero, a quelque peu douché les espoirs monténégrins en déclarant que l’UE « ne rembourse pas les prêts de tiers » et en exprimant la préoccupation de Bruxelles au regard de la dépendance du Monténégro vis-à-vis de sa dette. Elle a toutefois laissé une porte entrouverte, en précisant que l’UE serait prête à offrir son soutien par le biais de son plan d’investissement économique de 10 Mds €, prévu dans le cadre de la politique d’élargissement dans les Balkans occidentaux.

Bruxelles sait que, si le gouvernement Krivokapic ne rembourse pas le prêt, l’accord de projet routier passé avec la Chine, donne à cette dernière la possibilité de devenir propriétaire d’une partie des terres du Monténégro. L’ogre chinois prendrait alors pied durablement dans un pays candidat à l’adhésion à l’UE.

Sources : Svobodna Evropa, Denesen, DW, Frankfurter Allgemeine Zeitung.