Par Céline Bayou (sources : Prague Daily Monitoring, ČTK, Radio Praha, RFE/RL)
Le Président tchèque, Miloš Zeman, a rejoint une manifestation organisée par le Bloc contre l’Islam, à Prague le 17 novembre 2015, en marge des festivités autour du 26e anniversaire de la Révolution de Velours. Connu pour ses sensibilités islamophobes, le chef de l’État s’est adressé aux milliers de manifestants en les assurant qu’ils ne sont en rien des extrémistes et en les mettant en garde contre les immigrants qui, selon lui, « appartiennent à une culture de meurtriers propageant la haine religieuse». Le Président, accompagné d’un impressionnant service d’ordre, faisait face à des convaincus, qui arboraient des pancartes «Vive Zeman». Certains d’entre eux venaient d’Allemagne et représentaient le mouvement islamophobe Pediga.
L’intervention de M.Zeman a donné un drôle de ton à cette Journée de la lutte pour la liberté et la démocratie, alors qu’ailleurs se tenaient d’autres rassemblements, certains en soutien aux réfugiés, et que les attentats commis à Paris le 13 novembre étaient dans toutes les têtes. Le Président y a fait allusion lors de sa prise de parole, en rendant hommage aux victimes parisiennes avant d’enchaîner sur le rôle des médias dans la crise migratoire. Selon lui, ces derniers dénient à tout un chacun le droit d’exprimer son opinion et font eux-mêmes preuve d’intolérance quand ils qualifient ceux qui ne partagent pas leur avis de xénophobes et de racistes.
De son côté, le ministre en charge des Droits de l’homme, Jiři Dienstbier, a manifesté dans d’autres quartiers, notamment près d’un groupe dont le slogan était «Ce pays appartient à tous – Bienvenue aux réfugiés». Il a dénoncé la posture du Président qui, selon lui, crée des conditions favorables à la montée du fascisme dans la société. Les déclarations de M.Zeman sont xénophobes et islamophobes, et contribuent à accroître les peurs dans le pays, a dénoncé le ministre social-démocrate. Ce n’est pas la première fois que J.Dienstbier dénonce l’attitude du chef de l’État mais, cette fois, il a jugé que le Président avait fait un pas de trop en affichant son soutien à des groupes qui propagent la haine en République tchèque: «Je ne peux pas imaginer cela dans un autre pays civilisé et la société tolérer cela». Force est de reconnaître que certaines déclarations de Martin Konvička, le leader du Bloc contre l’islam, dépassent toutes les bornes de l’acceptable.
M.Zeman qui, précédemment, avait dit craindre l’introduction de la charia dans le pays et déclaré que les réfugiés ne méritaient pas sa compassion, a été rappelé à l’ordre en octobre 2015 par le Commissaire aux droits de l’homme de l’Onu. Le 17 novembre, il s’est étonné devant une foule enthousiaste de voir tant de jeunes hommes en bonne santé parmi les réfugiés: est-ce qu’ils ne devraient pas plutôt être dans leur pays et combattre l’EI?