Roumanie : la réforme de la justice, un parcours jonché d’obstacles

Depuis 2019, le projet de suppression de la Section d’enquête sur les crimes en justice (SIIJ), partie intégrante de la réforme de la justice, a été successivement porté par les gouvernements Orban (novembre 2019 – décembre 2020) et Cîțu (depuis décembre 2020). Les réformateurs estiment que cette institution sui generis s’écarte des principes de fonctionnement du ministère public. C’est également la conviction de la Commission européenne qui craint même que la Section spéciale puisse être utilisée comme un instrument de pression politique par des dirigeants peu scrupuleux.

Mais cette volonté de réforme, actuellement défendue par le ministre de la Justice Stelian Ion, se heurte depuis quelques semaines à de nouvelles oppositions. Consulté sur ce dossier, le Conseil supérieur de la magistrature a rendu un avis défavorable le 11 février dernier. L’institution estime que le projet de loi modifierait substantiellement la compétence judiciaire permettant de poursuivre des magistrats présumés auteurs de crimes et qu’il est donc de nature à diminuer l’indépendance des juges. La réforme, si elle aboutit, aurait pour conséquence la remise en vigueur des procédures judiciaires précédentes (loi n°207/2018) dans lesquelles l’enquête pénale appartenait aux parquets rattachés aux cours d’appel, à la Haute Cour de justice, à la Direction nationale anticorruption ou à la Direction d’enquête sur les crimes et le terrorisme. Or, les récentes déclarations de S. Ion montrant ses velléités de contrôle sur les différentes unités du Parquet font craindre à Bogdan Mateescu, président du Conseil supérieur de la magistrature, pour l’indépendance des procureurs.

Le ministre de la Justice a en outre dû faire face à un nouvel obstacle, plus inattendu : le Parlement s’est opposé à sa mesure. Le 9 mars, la Commission des droits de l’Homme de la Chambre des députés a rejeté, à la majorité des voix de ses 25 membres, le projet de loi de suppression de la SIIJ. Cet incident est la conséquence directe de la volatilité de la majorité gouvernementale. Tous les alliés de la coalition ne soutiennent pas la suppression de la Section spéciale. C’est notamment le cas de l’Union démocrate magyare de Roumanie, qui ne souhaite pas que les dossiers concernant les enquêtes menées à l’encontre de certains juges relèvent à nouveau de la compétence de la Direction nationale anti corruption.

Sources : Antena 3, Ziarul Bursa.