Les données concernant l'évolution démographique de la Russie publiées en février 2021 par l'office des statistiques Rosstat, font apparaître pour 2020 un solde naturel négatif (-688 700), plus de deux fois supérieur au résultat de 2019, quand le différentiel entre naissances et décès s'établissait à -316 000. Pendant l'année écoulée, la baisse de la population russe s'est accélérée, atteignant un rythme record depuis 15 ans (-847 000 en 2005). Ce bilan s'explique moins par la chute des naissances (-48 000) que par une hausse de 18 % de la mortalité (+323 800) et par l'évolution, également négative, du solde migratoire (-507 000), ce qui a entraîné une baisse de la population russe, ramenée à 146,2 millions début 2021. Cette évolution s'inscrit dans une tendance de fond, observée au cours des vingt dernières années, pendant lesquelles la population russe s'est contractée de 8,8 millions de personnes.
La publication de ces statistiques conduit aussi à s'interroger sur les chiffres concernant la mortalité causée par la pandémie de Covid-19. Au 26 février 2021, d'après le site officiel Stopcoronavirus, le nombre de décès en Russie attribués au coronavirus s'élevait à 85 304. Le virus ne serait à l'origine que d'un quart de la surmortalité enregistrée en Russie entre avril et décembre 2020. Or, aussi bien Tatiana Golikova, vice-Première ministre en charge des questions sociales, que le département de la Santé de la ville de Moscou (où la surmortalité a atteint 23 500 morts) ont attribué l'essentiel de cette mortalité excédentaire au Covid-19. Cependant, à l'inverse des préconisations de l'OMS, la méthodologie retenue par les autorités russes fait que seuls sont comptabilisés comme victimes de la pandémie les décès attribués directement au coronavirus.
Imputer au Covid 81 % de la surmortalité constatée en 2020, comme l'avait fait à la fin de l'année dernière T. Golikova, signifierait que l'épidémie est responsable de 262 000 morts en 2020. Considérer, comme la mairie de Moscou, qu'elle est responsable de la quasi-totalité de la surmortalité enregistrée l'an passé – le fait que plus de la moitié des décès excédentaires soit intervenue dans les deux derniers mois de l'année, au pic de la seconde vague, donne de la crédibilité à cette hypothèse – aboutit à faire figurer la Russie au premier rang des pays touchés par la pandémie en proportion de sa population (officiellement, en 2020, le pays se situait au 8ème rang en nombre de morts), avant même les États-Unis. Thèse soutenue par le chercheur Dmitry Kobak, à l'Université de Tübingen, dans une étude récente.
Sources : Rosstat, Rosbalt.ru, Stopcoronavirus-rf.ru, Meduza.io, rss.onlinelibrary.wiley.co.