Ukraine : la loi sur la privatisation entre (enfin) en vigueur

Par Jérémy Delaplagne (sources : Verkhovna Rada, Bureau de la Présidence, Kyiv Post, Unian.ua)

Préparé entre 2014 et 2016 par le ministre de l’Économie et du Commerce d’origine lituanienne Aivaras Abromavičius dans l’impulsion réformiste de l’après Maïdan, le projet de loi «sur la privatisation des propriétés de l’État et des municipalités» est resté bloqué au Parlement, causant la démission remarquée du ministre. Le 18 janvier 2018, avec trois ans de retard, le projet a enfin été adopté par le Parlement, avant d’être promulgué par le Président Petro Porochenko le 2 mars et publié au Journal Officiel le 6 mars.

Très attendu par les partenaires internationaux de l’Ukraine, ce texte devrait permettre à terme la vente de 3.000 entreprises détenues par l’État. La loi vise également à limiter l’impact négatif de ces entreprises jugées inefficaces et corrompues sur l’image de l’Ukraine auprès des investisseurs étrangers. La question du climat des affaires est jugée prioritaire par P.Porochenko, en particulier depuis la publication annuelle du classement Doing business de la Banque mondiale et dans lequel l’Ukraine se classe à la 86e place.

Concrètement, la nouvelle loi doit permettre la mise en place d’un processus de vente compétitif sous forme d’enchère par l’intermédiaire du système numérique ProZorro qui assure depuis sa création en 2016 la transparence de l’attribution des marchés publics, sous supervision du Parlement et du Conseil des ministres. La protection des investisseurs étrangers sera garantie par l’application temporaire de la loi britannique en la matière jusqu’en 2021 et la fin de la mise en place de la réforme judiciaire en Ukraine.

La loi mentionne une liste de secteurs non concernés par la privatisation, parmi lesquels les institutions de santé, les biens militaires, les ressources minières et minérales, le matériel et les installations liés au secteur nucléaire, l’audiovisuel public, les registres d’État, les métros ou encore le secteur de l’eau et les forêts.

L’acquisition de ces entreprises et biens publics est interdite aux acheteurs enregistrés dans des juridictions off-shore, aux entités légales dont les propriétaires ne sont pas identifiés ou aux personnes morales ou physiques identifiées comme touchées par des sanctions nationales ou internationales. Enfin, l’acquisition sera interdite aux résidents de la Fédération de Russie ainsi qu’aux entités légales russes ou dont les intérêts sont gérés depuis la Russie.

Pour rendre pleinement effectif le processus de privatisation, le Parlement doit maintenant définir légalement un principe de «concessions» destinés aux entreprises publiques restantes afin de faciliter la réforme de leur mode de gestion. Il s’agit de les amener à plus d’efficacité et de transparence afin de garantir l’accès aux capitaux étrangers (ouest-européens en particulier).