Alors que, dans un contexte de tensions inédites avec l’Ouest, la Russie manifeste son souhait de s’entretenir avant tout avec les Etats-Unis à propos de l’architecture de sécurité en Europe, l’Europe peine à s’insérer dans ce dialogue. Or, le 7 février, une rencontre entre Vladimir Poutine et Emmanuel Macron s’est tenue à Moscou, puis le 12 février un échange téléphonique entre les deux présidents, à chaque fois à l’initiative de la France.
Relatant la séquence, la presse russe a noté qu’elle avait été soigneusement coordonnée par Paris avec les partenaires allemand et américain. Pour la presse russe, cette concordance des agendas n’a rien d’anodin : si Américains et Russes appellent de leurs vœux une désescalade des tensions, aucune proposition concrète n’est sur la table. Les deux pays clés de l’UE tenteraient donc d’agir en médiateurs.
Pour Pavel Timofeev, directeur du département d’études européennes à l’Institut d’économie et de relations internationales de Moscou, la visite d’E. Macron à Moscou n’aurait pas été spontanée mais relèverait d’une tentative franco-allemande de médiation pour stimuler le dialogue entre Moscou et Washington. Le Président français chercherait à la fois à transmettre le point de vue européen à la Russie et à comprendre ce que l’Europe peut faire de concret. Il s’agirait de positionner l’Union européenne comme acteur international et centre de pouvoir, afin d’équilibrer l’influence américaine et chinoise dans le monde. E. Macron se présenterait à Moscou en tant que président de l’Union, tout comme Nicolas Sarkozy l’avait fait en 2008, lors de la guerre en Géorgie. Pour P. Timofeev, le Président Français agirait également conformément à un agenda politique interne, à l’approche de l’élection présidentielle.
Si, à l'issue de la réunion de plus de 5 heures qui s’est tenue à Moscou, le Président russe a noté que certaines idées françaises pourraient être les bases de discussions futures, le Kremlin n’a pas tardé à rappeler qu’aucune décision ne pouvait être prise directement avec la France qui, membre de l’OTAN, ne pourrait prendre de décision souverainement sur ces questions.
La presse russe semble donc comprendre la démarche française, ou franco-allemande, comme une opportunité pour l’ouverture d’un canal supplémentaire de discussion. Mais rien de plus.
Sources : Kommersant, Vedomosti, RBK.