Budapest : de l’esprit de révolte

Hier vent debout contre le totalitarisme, aujourd’hui contre un pouvoir ayant perdu le sens de l’histoire, les Hongrois semblent avoir gardé intact leur esprit de révolte. Tenaces, les sentinelles presque toujours anonymes de la démocratie battent régulièrement le pavé pour que ne reculent pas les droits des peuples.


Visiblement, les Hongrois ne sont pas prêts de ranger les banderoles, les sifflets et les haut-parleurs. Depuis plusieurs mois, il ne se passe pas une semaine sans que des milliers d’entre eux descendent dans les rues de la capitale pour exprimer leur ras-le-bol face à des décisions qui ne vont plus dans le sens de l’intérêt général. En avril et en mai 2017, les manifestants ont dénoncé, pêle-mêle, le projet de fermeture de l’Université d’Europe centrale, l’obligation faite aux ONG de déclarer tout financement de plus de 23 000 euros provenant « de l’étranger », le rapprochement tous azimuts avec Moscou, mais aussi la manière dont sont gérés les marchés publics.


L’entrée fermée de l’Université d’Europe centrale (CEU) financée par le milliardaire américain d’origine hongroise George Soros. Les manifestants dénoncent la loi du 4 avril 2017, perçue comme liberticide, aux termes de laquelle les instituts étrangers implantés en Hongrie devraient obligatoirement posséder un campus dans leur pays d’origine. Affiché sur la porte: « Je soutiens la CEU ».


Le 24 avril 2017, en face de l’ambassade de Russie à Budapest, des milliers de Hongrois ont défilé aux cris de « Budapest n’est pas Moscou ! ». Sur la pancarte de l’une des manifestantes: « Le gaz et l’atome russes irradient l’ambiance ».


«Paks atomique», du nom de la ville de Paks où la seule centrale nucléaire de Hongrie, dotée de deux réacteurs de construction soviétique, fonctionne depuis 1983. La Russie doit l’équiper de deux nouveaux réacteurs à horizon 2023.


Trônant au-dessus de la pancarte, l’excrément moustachu incarne le président János Áder, à qui les Hongrois reprochent d’être toujours prompt à signer les lois qui lui sont soumises.


« Remettons cette invasion pour après les élections » : caricature accrochée à proximité du Mémorial de l’occupation allemande érigé en juillet 2014 sans consultation préalable, et toujours très controversé pour le message révisionniste qu’il véhicule (voir Assen Slim, « Budapest: Hypertensions mémorielles »).


En face du Parlement, l’emplacement en plein Danube où se déroule à marche forcée la construction, elle aussi controversée, du plongeoir prévu pour les Mondiaux de natation des 28-30 juillet 2017.

Vignette : Bandeau de la page Facebook « Arrêtons Moscou », qui parodie le slogan de la consultation nationale lancée par le Premier ministre Viktor Orbán juste après sa signature de la déclaration des 60 ans du traité de Rome,« Arrêtons Bruxelles ». Peu après le 1er avril, les Hongrois ont en effet reçu un questionnaire dans leurs boîtes aux lettres, les interrogeant de manière très orientée sur leur perception des « diktats » de Bruxelles.

 

Budapest: The Spirit of revolt

* Assen SLIM est Enseignant-chercheur à l’INALCO et à l’ESSCA. Voir Blog.

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