Dès le début de la pandémie de la Covid-19, au printemps 2020, plusieurs quartiers roms (les mahali) de Bulgarie ont fait l’objet de mesure restrictives particulières, notamment des blocus mis en place par les forces de l’ordre avec contrôle et isolement des habitants. Or, ces quartiers isolés, principalement composés d’habitations de fortunes édifiées de manière illégale, ne possèdent que peu de commerces de premières nécessités (épiceries, pharmacies…). C’est le cas de Fakulteta à Sofia, de Zapad à Perouchtitsa, mais également des ghettos de Stolipinovo, de Stara Zagora ou de Kazanlak. Selon plusieurs ONG, les restrictions strictes imposées à ces quartiers pauvres ont exacerbé les disparités déjà très importantes entre la minorité nationale rom et le reste de la population bulgare. Près de 72 % des familles appartenant à la communauté rom vivraient désormais sous le seuil de pauvreté et certaines d’entre elles n’ont survécu au cours des derniers mois que grâce à leur pension d’invalidité. Sarah Perrine, directrice de Trust for Social Achievement, a déclaré récemment que les ménages roms auprès desquels son organisation travaillait étaient « au bord de la famine ».
Cette évolution inquiétante a permis à quelques clans roms d’asseoir la domination qu’ils exercent sur une partie de leur communauté à travers des activités d’usurier (les ménages ayant épuisé leurs ressources financières empruntent aux seuls qui acceptent de leur faire crédit) et de racket.
Par ailleurs, cette paupérisation valorise également les familles roms expatriées en Europe occidentale (Espagne, Allemagne, Italie, France, Angleterre…). Selon le CIReB, du fait de l’appauvrissement de cette minorité, toujours plus de familles seront inévitablement tentées par une migration économique en Europe occidentale, une expérience dont la réalisation repose parfois sur l’endettement auprès de proches ou d’usuriers. Dans le pays d’accueil, eu égard à leur faible niveau de formation, ces migrants ne peuvent prétendre qu’à des emplois peu rémunérés principalement dans les secteurs du bâtiment, de l’agriculture, du nettoyage et de la restauration. S’ils n’y sont pas recrutés par des employeurs, ils développeront probablement pour s’y maintenir des activités de survie (prostitution de rue, mendicité, contrebande…) qui les placeront à nouveau sous le contrôle des membres de la communauté les moins recommandables. Ainsi, les conséquences de la crise sanitaire et des mesures prises à l’encontre des quartiers roms seront à l’origine d’un nouveau phénomène de marginalisation de cette minorité et de mobilités internationales observables dès 2021.
Sources : Politico, Eurocom, CIReB, NGO.