Bulgarie : tensions avec Bruxelles après l’achat de SUV par le ministère de l’Intérieur

À la suite d’un marché public pour l’achat de 290 véhicules de patrouilles pour le ministère de l’Intérieur (MVR), un contrat a été signé pour plus de 13,9 millions de levs (7,1 millions d’euros) avec la société Industrie automobile bulgare (BAI) le 22 février 2018. Cet accord a été conclu aux termes d’une procédure accélérée. L’achat a été subventionné par le Fonds européen de sécurité intérieure pour faire face à la pression migratoire aux frontières bulgares, phénomène qui préoccupe Bruxelles.

Cependant, en juillet 2018, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a annoncé l’ouverture d’une enquête portant sur ce marché public. Entre temps, les véhicules avaient été livrés et, dès le mois d’octobre 2018, le gouvernement bulgare en faisait la promotion, cette dotation permettant d’illustrer la modernisation de cette administration.

Les investigations diligentées par l’OLAF se sont poursuivies jusqu’en décembre 2020 : aux termes de l’enquête, le 1er février, l’office a annoncé qu’il venait de déposer plainte pour trafic d’influence lié à ce marché public ayant permis l’achat de 350 véhicules pour le MVR. L’Office fonde sa décision sur « des allégations de fraude et de détournement de fonds européens » que son enquête a permis de collecter. Les observateurs de la vie publique bulgare n’ont pas tant été surpris par cette mise en cause que par le chiffre de 350 véhicules, qui ne correspond pas à la commande initiale (290).

L’OLAF a également précisé que « le ministère de l’Intérieur avait violé les dispositions de la convention de subvention en modifiant unilatéralement ses conditions » : il a choisi de se doter de SUV en lieu et place des véhicules tout-terrain préconisés par l’UE et censés patrouiller à la frontière. La Commission européenne a donc informé le MVR qu’une sanction financière pourrait suivre : le remboursement des 6 millions d’euros versés par Bruxelles.

En mauvaise posture, le gouvernement Borissov (centre droit) met en cause l’implication de l’ancien ministre de l’Intérieur Plamen Ouzounov (gouvernement intérimaire Gerdjikov), actuel conseiller anti-corruption du président Rumen Radev (soutenu par le Parti socialiste). P. Ouzounov était en fonction au moment où les irrégularités ont été signalées à l’OLAF (entre le 27 janvier et le 4 mai 2017), mais il n’était plus en poste au moment de la signature. Les soupçons perdurent, portés par la majorité gouvernementale, et cette affaire ravive le conflit entre le Premier ministre Boyko Borissov et le chef de l’État, deux ennemis jurés.

Sources : Svobodna Evropa, Mediapool, 24 chasa.