Seul signe d'une quelconque inquiétude: la police qui semble se trouver partout. Prenez un taxi le soir et vous serez sûr d'être arrêté au moins une fois, surtout si le chauffeur est visiblement d'origine caucasienne. Les contrôles sont de plus en plus fréquents depuis que Youri Loujkov, maire de Moscou, a ordonné à tous les ressortissants de la C.E.I. de se faire enregistrer. Les Moscovites ont peur, bien sûr. Certains sont partis se réfugier dans leurs datchas ou y ont envoyé leurs proches, la capitale leur semblant trop dangereuse.
Mais il faut bien retrouver un jour ou l'autre la réalité que l'on a fuie... Alors on essaye de ne pas y penser. Des tours de gardiennage ont été organisés dans certains immeubles, comme l'explique Viktor Mikhailovitch, un comptable. Chez lui, les maîtresses de maison et les retraités tournent le jour, les autres la nuit. Les Moscovites sont plus méfiants. La plupart pensent que tous ces attentats ont bien été fomentés par les Tchétchènes. Selon un sondage paru dans l'hebdomadaire Argoumenti i fakti, 73% d'entre eux seraient d'accord avec l'avis qu'il y en aurait trop dans leur ville. Peu nombreux sont ceux qui protestent contre les nouvelles mesures de Loujkov. Quelques petites manifestations ont cependant lieu, comme celle du 15 octobre, où l'on pouvait lire sur des pancartes "Stop apartheid in Moscow".
La guerre en Tchétchénie, suivie en permanence par les médias, ne fait pas pour autant l'unanimité chez les Russes. "C'est une guerre sans fin, déclare une habitante, nous en avons marre d'envoyer nos enfants là-bas". Tous les moyens sont bons pour éviter d'être enrôlé et envoyé dans cet enfer. S'inscrire à l'université pour retarder l'échéance en est un. L'on peut encore essayer de s'acheter un certificat permettant de se faire réformer. Bref, les Russes ne veulent pas pâtir des erreurs des politiciens et sacrifier leurs enfants au nom d'un conflit dont la solution semble loin d'être trouvée.