La main-d’œuvre ukrainienne, force de travail bon marché selon le ministre de l’Intérieur Mart Helme, serait désormais trop nombreuse en Estonie. Cet avis lapidaire ne semble pas partagé par certains entrepreneurs du pays.
Margus Nisumaa, à la tête de Production House OÜ, une société de production de maisons modulaires, a dû récemment fermer son affaire et licencier 20 personnes – dont 17 Ukrainiens – en raison du manque de main-d’œuvre et de la forte pression sur les salaires.
C’est tout le secteur de la construction de maisons de bois qui se trouverait en situation précaire et le chef d’entreprise en veut aux autorités estoniennes : « Grâce à notre ‘excellent gouvernement’, nous ne pouvons pas utiliser suffisamment d’Ukrainiens. Si le gouvernement poursuit dans la même voie, toute la production va quitter le pays. » En effet, rappelle l’entrepreneur, les Estoniens, eux, sont partis trouver du travail mieux payé en Finlande.
Partant de là, le recours à de la main-d’œuvre étrangère pourrait être une solution : à condition de ne pas payer les impôts et autres taxes et de ne pas respecter la loi, ironise Margus Nisumaa. En effet, la législation estonienne prévoit que les salariés étrangers doivent être payés au moins au salaire moyen soit, en Estonie, environ 1 300 €. Le calcul de l’entrepreneur est simple : un employé ukrainien lui coûte un tiers de plus qu’un salarié local, et il faut le former. L’équation semble insoluble et Margus Nisumaa affirme qu’il n’y a déjà plus grand intérêt à continuer de produire localement.
Un mois auparavant, le ministre estonien de l’Intérieur, Mart Helme (EKRE) avait affirmé que, tant que son parti resterait membre de la coalition gouvernementale, l’Estonie n’accepterait plus un immigré réfugié. Pour lui, au niveau européen, la seule forme acceptable de solidarité est de fournir « de l’aide technique et de l’expertise ».
Et de citer la forte pression migratoire qui pèse sur l’Estonie, en particulier en provenance de pays ex-soviétiques : « Si nous regardons bien, le plus grand nombre de demandeurs d’asile en Estonie ne vient pas du Moyen-Orient ou d’Afrique mais d’Ukraine. La Géorgie est en deuxième place, suivie de la Moldavie, tandis que l’Afghanistan et les pays comparables viennent après. » Pour le ministre, il n’est donc pas question d’accepter un seul réfugié venant du continent africain, alors que « l’Estonie a déjà assez de problèmes avec les migrants ukrainiens, même si les pays du sud de l’Europe n’y voient pas de problème ». Le souci de Mart Helme, plus qu’économique, est en fait que ces immigrés ukrainiens ont tendance à s’intégrer avec les russophones d’Estonie « ce qui nous pose un problème culturel et démographique ».
Sources : Postimees, BNS, ERR.