Par Jérémy Delaplagne (sources : sites officiels des présidences estonienne et lettone, et des ambassades des États-Unis à Tallinn et à Vilnius)
Les 16 et 24 février 2016 ont été marqués par des cérémonies nationales en Lituanie et en Estonie, célébrant le 98e anniversaire de leur indépendance respective, acquise en 1918. Elles ont été l’occasion pour ces pays d’affirmer leur position dans un contexte tendu entre la Russie et ses partenaires occidentaux.
La première à s’exprimer fut la Présidente lituanienne, Dalia Grybauskaitė. Dans son discours prononcé devant le Palais présidentiel à Vilnius, elle a rappelé la nécessité d’une défense collective européenne et internationale. La réintroduction du service militaire, depuis le 24 février 2015, a été saluée par la chef de l’État comme un «élément essentiel» de la préservation de l’indépendance, des valeurs démocratiques et de la liberté du pays.
Le 24 février, en Estonie, ce fut au tour de son homologue Toomas Hendrik Ilves d’exprimer son «inquiétude» et sa «préoccupation» concernant l’avenir du pays, malgré les progrès effectués. Il partagea aussi ses doutes quant à la capacité de l’Union européenne à faire face aux crises migratoire et économique.
L’occasion a été saisie par le Président américain Barack Obama. Dans une lettre datée du 15 février 2016 et adressée à D.Grybauskaitė, il a insisté sur le rôle de leader joué par la Lituanie dans le conflit ukrainien. Quant à John Kerry, le Secrétaire d’État américain, il a souligné la force des institutions démocratiques et l’implication de l’Estonie dans l’unité transatlantique.
Au-delà des discours, le soutien des pays alliés s’est manifesté au cours de ces journées par la participation de troupes américaines, britanniques et d’unités de l’Otan présentes actuellement dans la région. Elles ont été invitées lors de ces cérémonies d’indépendance. Quelques semaines après la sortie d’un rapport édité par le think-tank américain Rand soulignant la faiblesse du dispositif de défense otanien dans la région, cette présence est de toute évidence essentiellement tournée vers la Russie, présentée comme la principale menace à l’intégrité territoriale des États baltes.
La Russie dénonce d’ailleurs avec force les exercices militaires menés par l’Otan qui risquent, selon le Kremlin, de créer une escalade militaire susceptible de déstabiliser la région et de renforcer le sentiment d’insécurité russe sur ses frontières occidentales. Pour l’heure le pays, par l’intermédiaire de son Président Vladimir Poutine, n’a pas encore réagi aux discours prononcés lors des différentes cérémonies de commémoration d’indépendance.
Dans un contexte marqué par la montée des antagonismes, la rhétorique utilisée par les différentes parties creuse davantage le fossé entre la Russie et ses voisins baltes, dans un climat géopolitique tendu par la situation en Ukraine et par les pénibles avancées du dossier syrien. Au risque de faire des États baltes le troisième point de tension majeure entre la Russie et ses partenaires internationaux.