La Hongrie a récemment provoqué des remous au sein de l’Union européenne en assouplissant son régime de visas pour les citoyens russes et bélarusses, un geste qui va à l’encontre des sanctions imposées par l’UE en réponse à l’invasion d’ampleur de l’Ukraine par la Russie : en septembre 2022, l’UE avait suspendu son accord de facilitation des visas avec la Russie, rendant le processus d’obtention de visas plus long, plus coûteux et plus strict pour les ressortissants russes.
Malgré cette suspension, Budapest a donc décidé d’étendre son programme de « Carte nationale », initialement destiné aux seuls travailleurs invités de certains pays voisins, aux citoyens russes et bélarusses. Ce programme permet à des migrants choisis d’obtenir un droit de séjour en Hongrie pendant deux ans, renouvelable pour trois années supplémentaires, ouvrant potentiellement la voie à une résidence permanente.
Le 16 août, les pays nordiques et baltiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège, Suède, Lettonie, Lituanie et Estonie) ont exprimé leur inquiétude dans une lettre adressée à la Commissaire européenne aux affaires intérieures, Ylva Johansson : ils craignent que l’assouplissement annoncé par la Hongrie ne crée une brèche dans la sécurité de l'espace Schengen en facilitant l'accès à des espions ou saboteurs russes. Pour les ministres à l’initiative de cette lettre, la Russie a « intensifié ses actions hybrides agressives contre l’UE et les pays de l’espace Schengen. Il s’agit notamment de sabotages, d’actes de violence, de provocations aux frontières et d’instrumentalisation des migrants […] Ces actions constituent une menace pour la sécurité ».
La réaction de l’UE ne s’est pas fait attendre. Y. Johansson a averti que la Commission évaluerait la conformité de ce programme avec les lois européennes, soulignant que tout risque pour la sécurité de l’espace Schengen serait pris très au sérieux et rappelé que les décisions individuelles des États membres en matière de visas devaient veiller à ne pas compromettre l’intégrité de la zone.
En réponse aux critiques, le ministre hongrois des Affaires étrangères Péter Szijjártó a vivement défendu la position de son gouvernement, affirmant le 18 août que les ressortissants russes et bélarusses inclus dans le programme seraient soumis à des contrôles rigoureux avant d’entrer en Hongrie. Le programme ne poserait donc aucun risque pour la sécurité de la zone Schengen. Il en a profité pour accuser ses homologues baltes et nordiques de propager des mensonges et de se laisser aveugler par leur adhésion au « camp pro-guerre ».
Cet épisode s’inscrit dans un contexte plus large de relations tendues entre Budapest et Bruxelles, exacerbées par les liens étroits que la Hongrie continue d’entretenir avec la Russie. La politique étrangère hongroise, marquée par une diplomatie ambiguë entre Est et Ouest, contraste fortement avec la ligne dure adoptée par la majorité des États membres de l’UE, alimentant ainsi les divisions au sein de l’Union.
Sources : Euronews, Eunews.it, Site de la Commission européenne, The Kyiv Independent.